J'ai beaucoup campé dans ma vie. Enfant, mes parents m'emmenaient faire du camping au Canada, en Slovaquie ou dans le sud du Maroc. Alors quand des amis m'ont proposé de passer un week-end dans les montagnes du Hermel, ma curiosité l’a emporté. Il fallait que je tente l'aventure… Et je n'ai pas été déçue. Ce week-end a certainement été l'un des meilleurs de tous ceux que j'ai pu vivre au Liban.
7h30 samedi matin. Je quitte Beyrouth avec mon véhicule de location. C’est une petite Hyundai. Je me dirige vers Broummana pour retrouver mes amis. Se lever si tôt n'a pas été facile mais ils m'ont prévenue que la route vers Al-Jourd, où l'on devait établir notre campement, était assez longue et qu'il fallait profiter au maximum de notre première journée sur place. Alors j'ai pris une douche froide et je suis partie.
Nous quittons Broummana dans un convoi de deux voitures : la mienne, et un 4x4 de dernière génération, hautement climatisé et avec des roues pouvant abriter une grande partie de mon moteur. Un ami me dit : « Tu es bien courageuse avec ta petite voiture ! » Transcription du message : « Pour arriver au camp, il y a trois kilomètres de hors-piste, avec des pentes recouvertes de sable et des rochers ! » Pas de panique.
La route de Broummana à Chtaura est le premier cadeau : de magnifiques villages qui me rappellent parfois la Provence, dans le sud de la France. Ils se réveillent doucement alors que nous les traversons.
Nous nous arrêtons un instant avant de traverser Zahlé afin de déguster un sandwich labné, produit de la région. Il faut prendre des forces avant d'attaquer le passage de la Beqaa : des routes impeccables brusquement coupées, des nids de poule de plus de 30 centimètres de profondeur et des déviations passées sous silence… la route est un gymkhana. Dans la voiture, on passe un CD de la compilation d’un bar de Gemmayzeh. Ambiance dance floor des années 90 (Britney Spears, Pet Shop Boys et Aqua et son légendaire « I'm a Barbie Girl »). Ces tubes d’un autre temps résonnent à travers l’immense pleine de la Bekaa... Le mélange des genres est intéressant.
Une oasis de paix dans le désert du Liban
Nous traversons des villages où s’alignent des garages, de petites épiceries et des maisons en construction (ou du moins, occupées mais pas entièrement terminées).
Notre convoi atypique sillonne les pentes des monts Hermel sur une vingtaine de kilomètres avant de s'arrêter devant un rocher installé au bord de la route sur lequel est écrit à la peinture rouge : « Al-jourd », accompagné d'une flèche indiquant l'entrée du chemin de terre. C'est ici que commence la véritable aventure...
La route qui mène à Al-Jourd révèle un paysage grandiose. Nous traversons une crête où se rejoignent les montagnes du Akkar, du Hermel et de Donniyeh. Le site d'Al-Jourd s'étend sur 900 000 m2 de réserves naturelles, en pleine nature, sans aucune trace de civilisation, dans un total respect de la faune et de la flore locales.
Nous arrivons enfin au camping, après au total plus de trois heures de route. Ici, l'air est pur, sec et frais. Les installations sont rudimentaires, les tentes sont séparées par des allées balisées de cordes.
Simplicité et écologie au Liban pour un week-end au bout du monde
Nous savourons un succulent déjeuner avec le responsables des lieux et sa famille, sous la tente commune, autour d’une grande table : une délicieuse cuisine traditionnelle nous propose des plats composés des produits frais de la région. Nous buvons un café sous l'un des nombreux genévriers. Cet arbre parfois millénaire offre un espace ombragé où, installés sur de petits tabourets en bois, adossés contre le tronc ou allongés sur un tapis, nous découvrons une vue à couper le souffle qui respire la sérénité. Je pense vraiment que le Liban est un pays merveilleux, dont le secret est parfois caché, inattendu mais toujours magnifique.
L'après-midi se déroule tout aussi simplement. Nous participons à tout un tas d’activités. Pétanque, tir à l'arc, petite balade à dos d'âne…
Soirée fraîche et ambiance chaleureuse dans la nature libanaise
Au Liban, peu importe le lieu ou la situation, la soirée se dessine souvent autour des mêmes éléments : bon dîner, musique, danse, rires, un peu d'ivresse aussi (raisonnable cependant). Le diner est gargantuesque et divin. Cette fois s'ajoutent des cruches d'Arak que le maître des lieux apporte à table toutes les cinq minutes.
La nuit se déroule autour du feu de camp, installé un peu plus bas. Les flammes nous réchauffent un peu… On se moque gentiment des autres, de ceux qui ne voulaient pas nous suivre dans l'aventure « camping au bout du monde » : en bas, (comprendre : à Beyrouth) le temps est étouffant et les klaxons ne s’arrêtent jamais… Ici, nous sommes tranquilles.
Je regagne ma tente : une installation étudiée entièrement écologique. Tous les matériaux utilisés pour sa construction viennent de la région et ont permis de développer la microéconomie locale. Elle est en « semi-dure », autrement dit, la partie tissée en laine, sous laquelle sont installés dix matelas, est soutenue à gauche par des pierres. Couettes et couvertures ont été fournies en grande quantité car les nuits sont très fraîches… Au pire, il y a même une cheminée pour les plus frileux !
Un dimanche nature et sportif dans le Jourd
Le dimanche, je laisse un groupe de filles très motivées et équipées partir en randonnée avec Hussein. Quant à moi, je profite d'une balade à cheval, avant d'explorer le domaine en ATV. Accroché à la taille d’un ami, j'ai découvert de nombreux paysages, des vues ininterrompues sur les montagnes et les vallées environnantes et senti le parfum de la flore locale.
De retour à notre campement, nous avons savouré un déjeuner (oui, nous sommes toujours à table mais vous savez bien, « c'est le Liban, il faut manger ! ») et préparé nos affaires pour le départ.
Nous quittons Al-jourd à regret. Au bout du monde pendant 48 heures, dans un endroit simple mais très confortable, rudimentaire mais extrêmement propre, paisible mais enivrant, j'ai découvert l'un des plus beaux lieux du monde… Quand nous arrivons à la route, le paysage est plongé dans une lumière dorée et orangée. Cinq minutes plus tard, nos téléphones portables sont à nouveau connectés… (j’avais failli oublier leur existence).